Seth Klarman, Margin of safety – Course à la performance des gérants de fonds, le client est perdant (1/2)

Dans ce chapitre, l’auteur liste les différentes raisons qui selon lui expliquent que les gestionnaires de fonds réalisent pour la plupart des performances inférieures à celles du marché. Il explique que les intérêts personnels des gérants peuvent être contraires à ceux des investisseurs. Il décrit également la tendance à vouloir coller au marché et les risques encourus par les gérants lorsqu’ils cherchent à se démarquer.

« En matière d’investissement, il y a des périodes où le mieux est de ne rien faire. Cependant, les gestionnaires de fonds choisiront rarement cette alternative à moins que leurs confrères ne fassent la même chose. »

La grande majorité des investisseurs institutionnels sont obnubilés par la performance relative à court terme et n’ont pas le recul et la vision à long terme que les fonds des épargnants méritent.

Aujourd’hui, les investisseurs institutionnels dominent les marchés financiers. Ils représentent environ les trois quarts des volumes de transaction. Tous les investisseurs sont impactés par les décisions des professionnels compte tenu de leur poids dans les échanges financiers. Connaître leur comportement est utile pour comprendre pourquoi certaines actions sont surévaluées alors que d’autres sont bradées. L’investisseur pourra ainsi identifier des opportunités d’investissement.

Le « business » de la gestion de fonds

La plupart des gestionnaires de fonds sont rémunérés en fonction de la quantité d’actifs sous gestion et non de leurs résultats. Leur motivation est d’augmenter la taille du fond afin d’engranger des commissions plus élevées. Néanmoins, même si un fond devient plus profitable à mesure que sa taille augmente, maintenir un bon retour sur investissement devient d’autant plus difficile. Ce conflit entre les intérêts personnels des gestionnaires de fonds et ceux des clients est généralement résolu en faveur des gestionnaires.

La course à la performance à court terme

Il n’y a pas de gagnants dans la course effrénée à la performance à court terme. Tenter de battre le marché à court terme est absurde dans la mesure où les variations des cours des actions et des obligations sont aléatoires et parce qu’une quantité phénoménale d’énergie et de talent œuvre déjà dans ce sens.

Les obstacles à la bonne performance des institutionnels

Une difficulté que rencontre les investisseurs institutionnels réside dans le caractère bureaucratique du processus de décision. Gérer de l’argent n’étant déjà pas facile pour un individu, les investisseurs institutionnels sont confrontés à des difficultés supplémentaires avec un biais au conformisme, à l’inertie et à une diversification excessive qui résultent de prises de décision communes.

Tout gérant avec une idée d’investissement innovante ou contrariante prend un risque. Il assume un risque personnel au sein de la firme, qui va quant à elle porter le risque de l’investissement. Se tromper peut coûter cher. Au-delà de la perte financière, l’image du fond sera impactée, sans oublier le risque qui pèse sur la carrière du gérant. On comprend mieux pourquoi les fonds réalisent rarement des investissements qui sortent trop de l’ordinaire.

Il y a un autre obstacle à la bonne performance des investisseurs institutionnels : les gérants de portefeuilles sont des êtres humains. En plus des contraintes d’une gestion professionnelle, les gérants sont fréquemment victimes des mêmes forces que subissent les investisseurs individuels : la recherche de profits faciles et rapides, le confort apporté par des décisions consensuelles, la peur de voir les cours chuter… Surmonter à la fois les contraintes liées à une gestion professionnelle et les émotions individuelles peut être difficile.

Les implications de la quantité d’actif sous gestion

Les investisseurs institutionnels sont pris dans un cercle vicieux. Plus ils gèrent des sommes importantes, plus ils gagent d’argent. Néanmoins, le retour sur investissement augmente de manière inversement proportionnelle à la quantité d’actifs sous gestion, c’est-à-dire que le retour pour chaque dollar investi décroit à mesure que la quantité d’actifs augmente. La principale raison à cela est que les bonnes idées d’investissement sont rares.

Être totalement investi en permanence

La flexibilité des investisseurs institutionnels est souvent limitée par la contrainte qu’ils s’imposent d’être totalement investis en permanence. Beaucoup de gérants s’attribuent un rôle de « stock picker ». Ils pensent que leurs clients ont choisi le moment pour investir et les paient pour qu’ils investissent en permanence la totalité des fonds dont ils ont la charge.

En matière d’investissement, il y a des périodes où le mieux est de ne rien faire. Cependant, les gestionnaires de fonds choisiront rarement cette alternative à moins que leurs confrères ne fassent de même.

Rester totalement investi en permanence est cohérent avec la recherche d’une performance relative. Si l’objectif est de battre le marché (en particulier à court terme) et de ne pas se retrouver à la traîne, il est logique d’être en permanence investi à 100%.

A l’inverse, les investisseurs qui se focalisent sur la performance absolue, ne passeront à l’achat que lorsque leurs critères « value » seront respectés. Ils choisiront d’être totalement investis uniquement lorsque les opportunités disponibles seront à la fois suffisantes en nombre et suffisamment attractives. Ils ne seront que partiellement investis lorsque ces deux conditions ne seront pas remplies.

Window dressing

Le « Window dressing » consiste à soigner l’apparence d’un portefeuille avant les publications trimestrielles. Certains gérants vont acheter les titres qui ont le mieux performé au cours du trimestre et vendre ceux qui ont le moins bien performé dans l’objectif que leur rapport trimestriel soit plus présentable. Ils peuvent aussi vendre des positions avec des pertes latentes significatives en espérant qu’avec le temps les clients finiront par oublier ces erreurs. 

Un tel comportement est à la fois préjudiciable d’un point de vue financier et insultant pour les clients. Cela renforce également les mouvements de prix à la hausse comme à la baisse. Néanmoins, les titres qui pourraient ainsi se retrouver délaissés par le marché, peuvent devenir des opportunités pour les investisseurs dans la valeur.

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